Annoncé à la date du 31 décembre 2015, le Décret n° 2015-1886 relevant du portage salarial vient d’être promulgué complétant ainsi l’ordonnance du 04 Avril 2015.
Ce Décret stipule que les entreprises de portage salarial doivent justifier d’une garantie financière destinée à couvrir les salaires et les charges sociales (salaires, cotisations sociales obligatoires, etc.) des salariés en portage salarial, en cas de défaillance de l'entreprise.
Cette garantie est matérialisée par un engagement écrit de caution auprès d’une société de caution mutuelle, d’une compagnie d’assurance ou d’un établissement financier.
Le montant de la garantie financière :
Le Décret stipule qu’à titre transitoire et jusqu’au 1er janvier 2018, cette garantie est fixée aux montants suivants :
- Du 1er janvier au 31 décembre 2016 : 8 % de la masse salariale de l’année 2015, sans pouvoir être inférieure à 1,5 fois la valeur du PASS (plafond annuel de la sécurité sociale) pour l’année 2016 ;
- Du 1er janvier au 31 décembre 2017 : 9 % de la masse salariale de l’année 2016, sans pouvoir être inférieure à 1,8 fois la valeur du PASS (plafond annuel de la sécurité sociale) pour l’année 2017.
Les modalités de la déclaration préalable des entreprises de portage salarial
Le texte précise par ailleurs le contenu et les modalités de la déclaration préalable des entreprises de portage salarial prévue par l’article L.1254-27 du code du travail.
Demande de suspension de l’application du décret :
Bien qu’il soit attendu, ce Décret présente de nombreuses lacunes qui ont été tout de suite critiquées et contestées par la société Umalis Group, une société spécialisée dans le portage salarial depuis plus de 9 ans.
Motivée par un ensemble d’arguments légaux, Umalis Group s’est chargée de déposer une demande pour le report et la suspension de l’application de ce Décret.
Cette demande établie en application des dispositions de l’Article L.411-2 du Code des relations entre le public et l’administration affirme que le Décret en question présente une atteinte non seulement au principe d’égalité de traitement mais aussi à la liberté du commerce et de l’industrie.
Nous évoquons ici les principaux arguments présentés par Umalis Group pour le report de ce régime de garantie coûteux et discriminatoire.
1-Atteinte au principe d’égalité de traitement :
Comme mentionné ci-dessus, le Décret n°2015-1886 fixe le montant minimum de la garantie financière des entreprises de portage salarial, un montant qui ne devrait pas être inférieur à 2 fois la valeur du plafond annuel de la sécurité sociale de l’année.
En effet, alors que la législation relative au portage salarial tend à assimiler cette activité à celle de l’intérim, le décret ajoute des obligations à celles qui sont imposées aux entreprises de travail temporaires, sans que cette différence de traitement soit justifiée.
L’article R. 1251-14 du Code de travail applicable aux entreprises de travail temporaire prévoit que chacune des entreprises justifie, à tout moment, d’une garantie financière résultant d’un engagement de caution qui ne doit pas être inférieur à 8% du chiffre d’affaires, ni à un minimum fixé chaque année par Décret, compte tenu de l’évolution moyenne des salaires.
Or, le nouvel Article D.1254-1 du Code du travail, créé par le décret contesté est rédigé comme suit :
Le montant de la garantie financière prévue à l’article L. 1254-26 dont doit justifier l’entreprise de portage salarial au titre d’une année donnée est au minimum égal à 10% de la masse salariale de l’année précédente, sans pouvoir être inférieur à 2 fois la valeur du plafond annuel de la sécurité sociale de l’année considérée fixé en application de l’article D.242-17 du code de la sécurité sociale.
Alors que le risque couvert par chacune de ces garanties est sensiblement identique, rien ne permet de justifier la différence de 25% entre les deux régimes, si ce n’est la volonté d’entraver le développement de cette activité et de favoriser des acteurs déjà installés qui disposent d’importantes capacités financières.
2- Atteinte à la liberté du commerce et de l’industrie :
Selon le décret contesté, on constate que :
- La délivrance d’un engagement de caution par les établissements habilités nécessite la mise en place par l’entreprise bénéficiaire d’une contre- garantie, laquelle consiste assez souvent à déposer sur un compte bloqué une somme égale au montant de la garantie.
- La garantie exigée comporte un minimum égal à 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit aujourd’hui la somme de 77,232euro. Cela signifie qu’une entreprise de portage salarial ne peut être constituée que dans la mesure où elle réalise un chiffre d’affaire de l’ordre de 772,000euro, ce qui équivaut à considérer qu’elle doit compter, dès le début de son activité, au moins 25 salariés portés.
Ces seuils font largement obstacle à la création d’entreprise dans le secteur et renforcent de fait la position des entreprises pré-existantes.
Les arguments mentionnés ci-dessus et présentés à Monsieur le premier ministre Manuel VALLS à la date du 23 Février 2016 ont permis de suspendre l’application de ce Décret.
Il s’agit d’une décision judicieuse et favorable pour tous les acteurs du secteur du portage salarial.
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